Voici la lettre que je vais envoyer au directeur de la CPAM qui me convoque pour mes arrêts de travail. Je me suis fait pour cela aidée par Jean-Louis Murat qui a une musique parfois un peu funèbre:
Madame, cher confrère
Vous m’avez convoquée le 11 août
à 11 heures dans les locaux de Creil. Malheureusement je ne pourrai m’y rendre
malgré ma motivation, trop de médecins étant en vacances dans le canton à ce
moment.
C’est vrai, je fais souvent des
arrêts de travail,
-La plupart du temps ils ne
dépassent pas trois jours pour des
gastro-entérites, des grippes, des angines etc.
- Quelques patients
malheureusement ont des arrêts au long cours, dont un grand insuffisant
cardiaque : l’assistante sociale ; de la Sécu lui a conseillé de se mettre en arrêt le plus
longtemps possible pour ne pas trop perdre d’argent. Il mériterait pourtant de
se mettre en invalidité. Durant
longtemps j’ai eu la même attitude mais
la déléguée de l’assurance maladie il y a un an ou deux m’a mis en garde
contre cette pratique coûteuse.
Une autre de mes patientes était
suivie par un psychiatre pour une dépression grave, maintenant est en
invalidité.
D’autres souffrent de problèmes musculo-squelettiques
incompatibles avec leur poste de travail, ou sont enceintes chez Auchan ou
infirmières.
J’ai arrêté aussi deux patients
qui se relaient auprès de leur fille cancéreuse il y a u an, puis petit à petit
ils se sont remis au travail, d’abord 50%, puis actuellement temps complet.
-J’ai dans ma patientèle 3% de
patients bénéficiant de la CMU, ce qui veut dire que ma patientèle est active, doit
faire souvent beaucoup de km pour se
rendre sur leur lieu de travail : alors que je n’arrêterais pas forcément si mes patients
n’avaient pas à conduire. Par exemple un
patient qui souffre d’une maladie de Crohn évolutive peut faire trois kilomètres pour se
rendre à son travail, mais pas forcément
50 km, surtout dans les bouchons et dans les transports en commun.
Si j’avais 50% de CMU,
mathématiquement je ferais deux fois moins d’arrêts de travail.
J’ai parfaitement conscience
qu’il faut, pour que le système reste viable, que chacun fasse des économies,
les médecins ne doivent pas trop, ni arrêter, ni prescrire trop de médicaments
ou de bons de transport.
-J’estime faire faire de
conséquentes économies en ne voyant les
patients chroniques stables que tous les six mois. De plus, prescrivant plus de
deux fois moins que les confrères, mes patients ont beaucoup moins d’effets
secondaires graves.
-Mes patients ne souffrent pas
non plus de dépendance aux benzodiazépines car je n’en prescris pas, alors je
ne fais pas d’arrêt pour cette pathologie.
D’ailleurs, idéalement lorsque je reçois des patients sous
benzodiazépines, je devrais leur faire systématiquement un arrêt de travail,
car leurs réflexes sont diminués et ils sont parfois un danger public.
-Quand un patient vient pour
souffrance au travail, ce qui arrive de plus en plus, étant dans un département
où les fermetures d’entreprises ne sont pas rares, je préfère lui faire une
consultation longue pour comprendre la problématique, un arrêt de travail pour calmer le jeu, plutôt que de prescrire des antidépresseurs
qui sur le long terme seront beaucoup plus coûteux financièrement en terme
d’effets secondaires et de pérennisation de la pathologie.
-La plupart de mes patients sont
contrôlés, je fais des protocoles de soin de plus en plus. Et le médecin de la
Sécu valide dans presque 100% des cas mes arrêts de travail.
Je me fais souvent aider du
médecin du travail pour amorcer une reprise aménagée, pour proposer des
inaptitudes quand c’est justifié qui vont conduire à un licenciement
Je serais très heureuse si à
moyen terme nous nous pouvions nous rencontrer dans les locaux de Méru, ou à la
rigueur à Beauvais. J’avais proposé il y a quelques années au docteur Sécu d’organiser
une table ronde entre les médecins de la Sécu et les généralistes, mais il m’a
répondu que cela ne serait pas bien perçu par les généralistes. Pourtant je persiste à croire que cela serait
une bonne idée que chacun puisse communiquer ses points de vue.
J’ai collé votre courrier sur la
porte de mon cabinet afin que mes patients soient prévenus et qu’ils soient
moins tentés de me demander des arrêts de travail peu justifiés.
Veuillez recevoir mes sincères
salutations confraternelles
Très bon courrier.
RépondreSupprimerVous pensez qu'il va être lu?
Oui, je l'envoie en recommandé AC. C'est ce qu'ils m'ont demandé de faire, ça ou la confrontation, mais celle-ci se déroule dans une ville beaucoup plus loin (merci la centralisation) et je n'ai pas le temps
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